Evelyn Ashamallah
 
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19 - 25 OCTOBRE 2005
 

PEINTURE. A la galerie Khan Maghrabi, 16 tableaux d'Eveline Achamallah, traitent le thème du mouled (anniversaire d'un saint), cérémonie que célèbrent les Egyptiens dans la joie avec les autres festivités du Ramadan.

 

Vivre des sensations intenses


Une scène panoramique du mouled, selon Eveline Ashamallah
   
Des tentes géantes et multicolores sont montées autour de la mosquée d'Ibrahim Al-Dessouqi, des cercles de zikr, une danseuse orientale, des jeux magiques animent les lieux. Le parfum des gâteaux tels que le kaak et kaab al-ghazal (cornes de gazelle) chatouille les narines des passants. Des guirlandes électriques multicolores ornent le minaret et les voûtes de la mosquée, de même, des vendeurs ambulants négocient et écoulent leurs marchandises, invoquant la bonté du saint Al-Dessouqi. Des jeux de tir, des noms de cirques, Al-Helw et Aqef, sont évoqués. Des enfants jouent avec leurs fanous (lanternes) et des derviches rappellent la grandeur de Dieu. Autant de menus détails se mêlent dans une peinture gigantesque pour former une scène panoramique qui résume dans son ensemble le mouled de Sidi Ibrahim Al-Dessouqi (fête populaire annuelle du gouvernorat de Dessouq qui rassemble bon nombre de fidèles). Cette peinture, en grand format, de la peintre Eveline Achamallah, trône en prestige dans un grand espace de la galerie Khan Maghrabi et invite tout amateur d'art, mais aussi tout visiteur de la galerie, à savourer avec l'artiste la célébration du mois sacré de Ramadan.

Née à Dessouq, Eveline Achamallah conserve constamment en mémoire l'ambiance du mouled. « Le mouled est une manifestation religieuse, un rassemblement populaire autour d'une personnalité légendaire dont on loue les prodiges. Cette manifestation est ancrée dans ma pensée. Ce sont des souvenirs d'enfance qui inspirent mon travail », affirme Eveline.

Elle étaye ses peintures de la liberté et du cachet de pureté et de vivacité qui marquent de leur empreinte la nuit du mouled.

L'euphorie est ressentie à travers une palette de couleurs vives, criardes et frétillantes. Des couleurs de la vie en Egypte sous l'effet brûlant du soleil. « Avec spontanéité et simplicité sur le plan de la
forme, et avec un foisonnement de couleurs, je fais une rétrospective, restituant l'innocence de l'enfance, les airs inouïs de cette fête qui nous détache d'un monde où sévissent la terreur sanguine et les souffrances », déclare cette talentueuse coloriste. Dans ses peintures, le quartier de Dessouq change d'aspect.
Il vit au rythme de la baraka (bénédiction). « Une semaine de préparatifs, de prières, de charité et de jeux précède et anticipe la fête populaire », déclare la peintre. Elle dépeint sa célébration associée à la mise en éclairage des profondeurs humaines. « Garnements et guirlandes ne signifient pas nécessairement une célébration, puisque la véritable gaieté siège au fond du cour humain. Actuellement, l'homme est en manque de bonheur », souligne Achamallah.

L'essentiel pour l'artiste n'est pas de copier les rituels de cette festivité annuelle, mais de restaurer la quête qui nourrit l'élan de l'homme. Achamallah donne chair et vie à l'âme égyptienne dans toutes ses peintures. Traitant de sensations humaines, l'artiste parsème ses peintures de touches réalistes et de détails simplifiés. Cela sans perturber la vision de l'observateur.

Etant une célébration de l'être, les peintures d'Eveline sondent les profondeurs de l'âme, et ses thèmes tournent souvent autour des superstitions et des croyances populaires. Une de ses peintures traite du zar, un rituel d'exorcisme. Dans une autre, figure al-aroussa (la poupée populaire). « Cette poupée en papier est employée pour chasser le mauvais oil ». Dans une troisième s'étalent un

oil ou des yeux, une paume de main, qui représentent des créatures abstraites, des bouches, etc. L'artiste traite d'un monde clos et inaccessible dont elle tente de déchiffrer les talismans : « Loin de configurer la convoitise ou la jalousie, l'oil, c'est la vision, l'instrument employé par l'homme pour coexister avec autrui dans le monde. La paume de la main, c'est la mimique, qui transcrit les gestes, les moyens d'expression. Quant à la bouche, c'est la parole ». Achamallah met en relief dans ses peintures les diverses sensations de l'être humain qui alimentent sa gestuelle.

Elle fait dégager également ses obsessions, le monde étrange des magiciens et charlatans. Par ailleurs, Achamallah peint en caricaturant Cheikh Hamed, un personnage réel puisé dans sa mémoire. « Les personnages que je peins ne sont pas morts en moi. Au contraire, ils sont vivants, parlent, bougent et se rencontrent », déclare l'artiste. Eveline fait ressortir le regard très expressif, mais en même temps perfide du cheikh, sa galabiya aux couleurs écarlates et ses faux bijoux. Il est entouré de ses deux femmes et d'un bon nombre de disciples.

Dans l'ensemble, les peintures d'Achamallah constituent une partie d'un tout. Elles ne sont pas réductibles à un espace, mais ouvertes à l'infini qui ne délimite pas l'existence de l'homme. « Le cadre dans lequel nous vivons est imaginaire. Nous existons dans un espace plus large et indéterminé ».

Chaque peinture, tel un morceau exquis, entretient un conte que l'observateur est appelé à vivre sans en chercher la cohérence. Le tout se déroulant dans une ambiance heureuse. A travers tout un monde euphorique, Eveline Achamallah ne se lasse pas de nous divertir.

 

NĂ©vine Lamei
 
   
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